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Couverture du "Compte-rendu du Congrès de Psychiatrie et de Neurologie de langue française" (tome 2), présenté par Pierre Warot

L’annonce, ce 11 avril, du décès de Jacques Rognant plonge la communauté des thérapeutes TCC dans le deuil de celui qui fut le fondateur de la pratique cognitive-comportementale en France. Par ses travaux, son engagement associatif et ses publications, Rognant a joué un rôle considérable dans l’évolution des Thérapies Comportementales et Cognitives (TCC) en France, en introduisant et adaptant les techniques de TCC au contexte français.

Si, comme beaucoup de comportementalistes et de cognitivistes, c’est la lecture de Freud pendant ses études de médecine qui éveilla sa vocation de psychiatre, son attachement à la pratique scientifique en fera le pionnier des thérapies comportementales en France. Il a joué un rôle important dans le développement des TCC en France, notamment en contribuant à l’approfondissement de la compréhension et de l’application de ces thérapies dans le traitement de divers troubles.

Praticien de ce qui était à l’époque les thérapies comportementales, le Brestois Jacques Rognant a marqué la psychothérapie française avec la parution en 1970 chez Masson du premier texte en langue française sur les TCC, « Les thérapeutiques de déconditionnement dans les névroses », compte-rendu pour le Congrès de psychiatrie et de neurologie de langue française, qui marquera la diffusion des thérapies comportementales en France. C’est une revue essentielle de la littérature sur les techniques de TCC qui se développaient depuis les années 50 dans les pays anglo-saxons et qui étaient encore à cette époque méconnues en France. Il a également rendu accessible les travaux de Joseph Wolpe (1970) en traduisant en 1976 son ouvrage fondamental sur la thérapie comportementale, « The Practice of Behavior Therapy », publié chez Masson avec une préface du psychiatre Pierre Pichot.

Rognant a également mené des études contrôlées sur des cas particuliers, comme l’exhibitionnisme, ce qui a contribué à établir une base empirique pour l’efficacité des TCC dans le traitement de troubles spécifiques. De plus, il a abordé des troubles musculaires avec des applications de la TCC, comme dans le traitement de la crampe de l’écrivain avec Ladouceur en 1977, en utilisant des techniques de désensibilisation systématique, démontrant ainsi la diversité des applications de la TCC au-delà des troubles anxieux ou de l’humeur.

Jacques Rognant a participé, le 3 novembre 1971, rue Cabanis à Paris, au premier conseil d’administration de l’Association française de thérapie comportementale (AFTC) dont le but était l’« étude des thérapies comportementales (behavior therapy), issues des théories de l’apprentissage, en particulier dans le cadre de la recherche, de l’application et de l’enseignement en psychologie et en médecine ». Cette date est historique avec la réunion des pionnières et pionniers des TCC en France : Mélinée Agathon, Philippe Guilbert, Pierre Pichot,  Roland Bessis, Didier-Jacques Duché, Jean Guyotat, Gilbert Lelord, André Roussel, Daniel Widlöcher, et René Zazzo. L’AFTC a ensuite pris le nom d’ Association Française de Thérapie Comportementale et Cognitive (AFTCC). Après en avoir été le vice-président, Jacques Rognant en est devenu le président en 1976.

Sa disparition est l’occasion de nous remémorer ceux qui nous ont précédés dans la pratique et la diffusion des psychothérapies fondées sur les preuves. Son parcours illustre l’engagement et le rôle essentiel que des femmes et des hommes, précurseurs des TCC en France, ont joué. Lorsque nous pratiquons la désensibilisation, lorsque nous cherchons à améliorer notre pratique en intégrant les dernières recherches et en élargissant son application à d’autres troubles, lorsque nous suivons un cours ou un atelier à l’AFTCC, nous bénéficions aujourd’hui du travail de personnes telles que Jacques Rognant.

Remercions-les et ne les oublions jamais.

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