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Portraits en noir et blanc de Jean Delay et Raphaël Gaillard

Le Pr Raphaël Gaillard, responsable du pôle hospitalo-universitaire de psychiatrie de l’hôpital Sainte-Anne, vient d’être élu à l’Académie française. Cette nomination ne représente pas seulement un honneur individuel mérité, mais elle est aussi une promesse de continuité et d’enrichissement pour le dialogue fructueux entre la psychiatrie et le monde des lettres. Elle également s’inscrit dans la poursuite d’une histoire essentielle.

Revenons en 1955 : un nouveau mot apparaît dans un texte de Jean Delay et Pierre Deniker du Bulletin de l’Académie Nationale de Médecine, celui de « neuroleptique », terme construit à partir du grec ancien pour désigner le premier traitement qui « calme les nerfs » des patients souffrant de troubles psychotiques. La passion des mots rencontre la pratique médicale et Jean Delay ne se limite pas à l’étymologie. De ses travaux sur André Gide à son analyse de la dérive psychologique d’Exupère du livre d’Henri de Montherlant, « Un assassin est mon maître », l’écriture a mené Jean Delay au fauteuil 17 de l’Académie française en 1959. Cette écriture l’a toujours accompagné : il écrivait déjà des nouvelles pendant son internat à La Salpêtrière.

Quels points communs entre un éminent psychiatre et un illustre académicien ? Le premier est sans doute l’approche à la fois scientifique et humaniste de la santé avec une méthodologie rigoureuse qui fait fi des dogmes et des impressions. À cela s’ajoute la finesse et la profondeur d’une compréhension psychologique de l’humain venant nourrir à la fois l’accompagnement des personnes et la construction ou l’analyse des personnages littéraires. Jean Delay maniait ainsi l’art de l’interdisciplinarité, faisant se rencontrer la médecine, la neurologie, la psychiatrie et la littérature avec au cœur la passion de l’innovation.

S’il était encore parmi nous en 2024, Jean Delay pourrait discuter avec son confrère du fauteuil voisin, le numéro 16, celui du Pr Raphaël Gaillard, nouvellement élu à l’Académie. Cette proximité n’est pas uniquement celle d’une appartenance à cette institution. Des liens plus profonds relient, à 65 ans d’écart, l’entrée à l’Académie de ces deux psychiatres, ceux d’une autre institution dont ils sont tous les deux issus : le service hospitalo-universitaire de l’hôpital Sainte-Anne.

Nous connaissons toutes et tous les difficultés et les crises que traversent la psychiatrie et, plus largement, la société. Que le lien entre psychiatrie et littérature perdure est une bonne nouvelle. Nous avons tout à gagner de cette interdisciplinarité.

Dans son hommage en 2015 à Jean Delay, Raphaël Gaillard citait Sacha Guitry : « au Professeur Jean Delay, qui sait tant de choses, et à Jean Delay, qui devine le reste ». N’est-ce pas ce que l’on peut attendre et espérer de ce lien continu entre la psychiatrie et les lettres : que l’une sache tant de choses et que les autres devinent celles restantes ?

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